Du bout de la craie
Publié le 2 Avril 2010
Henri Bauchau est pour moi un éveilleur de coeur. Mes palpitations accompagnent sa plume. Je ne sais y résister. Antigone avait été une vraie rencontre. J'y retrouvais la force de l'écriture antique, mais en français, ce qui demande moins
d'effort.
Ici aussi, j'ai aimé. Avec Le boulevard périphérique, nous suivons un narrateur perdu entre la maladie de sa belle-fille et ses souvenirs de la Résistance. La mort, le doute, les choix, l'engagement, la vie…
Pour ce roman, la poésie et le travail psychanalytique nous dirigent. J'ai vraiment aimé sa force d'écriture,
sa construction. Un livre de Bauchau ne laisse pas le lecteur innocent ; une trace s'installe…
J'aime quand nos enfants égaient la rue, quand les voisins s'approchent de leurs dessins et que les dialogues fusent. Il ne
manque alors que le soleil et les petites casquettes de l'été. J'imagine les chaises installées sur le trottoir, et le temps qui s'étale…
J'ai alors en tête un vieux souvenir de la ville de Sparte, tandis que j'étais ado. La douceur de la soirée
avait conduit les habitants sur la place centrale et la population tournait et
discutaillait, le long des terrasses des cafés. C'était impressionnant. Toutes les générations
étaient là, et se laissaient porter par le flot des mots, sans avoir le souci du temps qui passe. Bien sûr, ce flot de citadins nourissaient mes fantasmes d'hellénistes, me laissant imaginer en
cette scène des traces de l'organisation clanique antique. Pure imaginaire, je le savais. Mais tout de même, voir les citadins se retrouver ainsi pour passer une soirée dans la rue, pour la fille
du nord que je suis, c'est si rare… Alors, en attendant, j'aime quand les dessins de nos enfants rassemblent nos voisins…